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Rééducation kinésithérapique sensitive des douleurs neuropathiques

Titre original : A. Morier et al. Pratique de la rééducation sensitive des douleurs neuropathiques. Douleurs Evaluation – Diagnostic – Traitement (2019) 20, 175-182


Auteur : Laëtitia Rachel Sellem

Formatrice à l’INFMP – www.infmp.fr


Introduction

Claude Spicher a introduit une méthode de rééducation sensitive de la douleur destinée aux patients présentant des douleurs neuropathiques. Les kinésithérapeutes du Centre de référence maladies rares neuropathies amyloïdes familiales et autres neuropathies périphériques rares (CRMR) ont été formés à cette méthode.

L’International Association for the Study of Pain définit la douleur neuropathique comme une « douleur liée à une lésion ou une maladie affectant le système somatosensoriel ». Sa prévalence est de 7 à 8% de la population européenne. Cette douleur peut survenir dans le cadre d’une neuropathie, d’une lésion nerveuse posttraumatique ou postchirurgicale. On retrouve une lésion axonale avec une composante spontanée (sensation de brûlure, compression) et paroxystique (décharges électriques, coups de couteau) provoquée par le froid ou chaud, les frottements, la pression. D’autres symptômes comme des fourmillements, picotements ou démangeaisons peuvent également être décrites : le questionnaire DN4 est l’outil de référence pour diagnostiquer ces douleurs.

De plus, ces douleurs ne répondent pas aux traitements classiques antalgiques. Les anti-dépresseurs et anti-épileptiques sont actuellement utilisés afin d’apaiser les douleurs neuropathiques. En parallèle, un traitement rééducatif en kinésithérapie peut être mis en place.



Méthode de rééducation sensitive

Cette méthode mise en place par Claude Spicher a été crée en 2004, elle a fait ses preuves à un niveau de preuve 2B.

Cette méthode s’applique à la peau : toute douleur neuropathique s’accompagne d’une hypoesthésie, à laquelle peut s’ajouter une hypersensibilité au toucher (allodynie mécanique).

Il présente plusieurs stades d’hypoesthésie :

  • Stade 1 : hypoesthésie simple (stimulus tactile est perçu de manière bizarre)

  • Stade 2 : allodynie simple (stimulus non nociceptif provoque des douleurs, pas de douleurs au repos)

  • Stade 3 : névralgies intermittentes +/- allodynie mécanique

  • Stade 4 : névralgies incessantes +/- allodynie mécanique

  • Stade 5 : SDRC

L’objectif est de diminuer l’hypoesthésie, résorber les allodynies mécaniques et diminuer ou éviter l’apparition des douleurs neuropathiques. La rééducation kinésithérapique est basée sur l’éducation thérapeutique et l’autonomisation du patient. Elle peut être limitée par un manque d’adhésion du patient, une anesthésie vibrotactile ou une absence de zone de contre stimulation à distance.



Explication de la méthode


Outils d’évaluation et de rééducation

Les outils suivants sont utilisés :

  • Monofilaments de Semmes—Weinsein : évaluation du seuil de perception à la pression

  • Compas de Weber : test de discrimination des deux points statiques, évalue l’hypoesthésie

  • Générateur de vibrations (vibradol) : évaluer le seuil de perception à la vibration + rééducation

  • Atlas : outil indispensable, traite de la neuroanatomie clinique et indique le territoire maximal de provenance cutanée d’un nerf sensitif

  • Questionnaire de la douleur de Saint-Antoine (QDSA)

  • L’EVA

  • Esthésiographie : cartographie de l’hypoesthésie, à l’aide des monofilaments

  • Allodynographie : cartographie à l’aide du monofilament 15g

  • Arc-en-ciel des couleurs : sept filaments des 7 couleurs de l’arc en ciel permettent d’évaluer la sévérité de l’allodynie mécanique statique

  • Signes de fourmillements : localisation du site de lésion axonale/régénération axonale

Bilan diagnostic

On le réalise à partir de la cartographie du territoire cutané associé à la lésion axonale, à partir des 4 examens suivants : l’esthésiographie, le test de discrimination des deux points statiques, les signes de fourmillements et les qualificatifs.

Rééducation

On commence par rééduquer l’allodynie mécanique statique par la réalisation de séries de contre stimulations vibrotactiles, à domicile, à distance de la zone allodynique. On utilise un matériel de type « peau de lapin » afin de réintroduire ce toucher comme non douloureux. On doit réaliser l’exercice 8 fois par jour pendant 1 minutes. La zone de contre stimulation sera indiqué au patient selon le bilan effectué.

Puis dans un second temps on traite l’hypoesthésie sous-jacente, selon un programme d’auto-rééducation progressive :

  • Faible : thérapie du « touche à tout », le patient stimule la zone avec 3 matériaux et comparer avec une zone « normale ». On le pratique 4 fois durant 5 minutes par jour

  • Forte : on utilise la « rééducation des tracés » (faire la différence entre un toucher statique ou mobile ; entre un toucher droit ou courbe), 4 fois 5 minutes par jour


Conclusion

Les douleurs neuropathiques sont fréquentes dans les atteintes centrales et périphériques et freinent la rééducation en kinésithérapie.

On rééduque en premier ordre l’allodynie, puis l’hypoesthésie sous-jacente : il est important d’identifier le type de douleur et d’autonomiser le patient.

Dans le centre CRMR, cette rééducation est associée à de la sophrologie ou de la relaxation afin que les patients ne soient pas envahis par leurs émotions (pouvant amplifier leurs douleurs).

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